
Cela faisait plusieurs temps qu'elle n'avait pas repris le courage d'écrire au moins quelques pensées. Elle était encore dans son âme, empreinte d'une irritation fugitive, se mêlant toujours à de l'inquiétude et de l'effroi. A ce jour, ses préoccupations ébranlaient tout son être. Ce malaise qui demeurait en elle l'empêchait même de trouver le sommeil. Mais parfois dans sa solitude, elle se surprenait à rêver. Ce même rêve la hantait à toutes les heures de son existence.
Le rideau se levait et elle paraissait en scène. Vêtue de noir, échevelée, elle était dramatiquement belle. Sa voix avait pris des notes pathétiques, douloureuses, qu'elle ne possédait pas autrefois. Les regards n'étaient fixés que sur elle quand une voix soudain l'appelait. "Regarde-moi!" Elle tournait la tête vers l'inconnu. Une larme tremblante dans ses yeux était voilée par l'ombre de ses grands cils lourds. L'homme prononçait alors d'une voix à peine audible "Je regrette, oui je regrette pour tout ce qui vous a fait pleurer."
Le rideau tombait alors au milieu des applaudissements. Elle joignait instinctivement ses mains qui étaient froides comme si elles avaient frôlé le givre. La mousseline brodée de son corsage frissonnait le long de son buste un peu ployé. Sur le reflet d'or de ses yeux clairs une ombre s'étendait. Une ombre de souffrance jeune, profonde, effrayée. Elle songeait "Comme j'ai froid!"
Oui, elle avait froid. Froid jusqu'au cœur, où se mourait secrètement un rêve.
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beau
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